Performance VS Engagement RSE

La performance financière est-elle compatible avec l’engagement RSE ?

La responsabilité sociétale et le concept de « performance extra-financière » sont aujourd’hui au cœur des débats de la stratégie d’entreprise. La RSE représente une opportunité de développer de nouveaux modèles d’affaires, créateurs de performance financière et extra-financière. 

Lors d’un webinaire sur la RSE des entreprises, kShuttle a invité Alain Jounot, Responsable du département RSE de l’AFNOR, et coauteur du livre Entreprises performantes et responsables c’est possible ! (Afnor Editions), à intervenir sur l’opportunité offerte aux entreprises d’améliorer leur performance extra-financière et globale au travers d’une démarche RSE pertinente et crédible. Alain Jounot a partagé l’expérience de l’AFNOR dans le suivi qu’elle a réalisé de près de 1000 entreprises françaises dans la mise en œuvre de leur démarche RSE et leur labellisation « Engagé RSE » (un label développé par l’AFNOR et aligné sur les recommandations de la norme ISO 26000).

kShuttle : Selon la norme ISO 26000 et l’AFNOR, comment structurer une démarche RSE performante ?

A.J. : La norme ISO 26000 donne un cadre international et définit la RSE comme la contribution des entreprises et des organisations aux enjeux de développement durable. Le but de l’ISO 26000 est de mener une réflexion pour établir une démarche RSE crédible et robuste. Lorsqu’une entreprise structure une démarche RSE, et pour que cette démarche soit performante, l’entreprise doit mener sa réflexion sur deux niveaux : 

– Une réflexion interne sur son niveau de contribution aux enjeux du développement durable ainsi que sur ses impacts sur son environnement et sur la société ; 

– Une réflexion externe en identifiant ses parties prenantes ainsi que les besoins et attentes de celles-ci au regard du développement durable.

kShuttle : Quel lien entre performance d’entreprise et performance extra-financière ?

A.J. : La performance d’entreprise ne se définit pas uniquement du seul point de vue financier. Dans la mesure où elle dépend également du capital immatériel de l’entreprise, sa définition doit inclure la dimension extra-financière. Pour produire de la richesse, une entreprise s’appuie sur un capital humain, des parties prenantes, partenaires et clients, un capital organisationnel, un système d’information, des connaissances, un savoir, une marque. Dans cette acception, la notion de performance souligne le caractère multidimensionnel de l’entreprise : la performance d’une entreprise s’analyse tant sur un plan qualitatif que quantitatif, et couvre sur ses pratiques managériales, ses systèmes organisationnels ou encore ses produits ou services.

kShuttle : L’AFNOR a mis en place le label « Engagé RSE ». Sur quels critères d’évaluation et sur quelle approche s’appuie ce label ?

A.J. : Ce label s’appuie sur les lignes directrices de la norme ISO 26000 et d’autres références internationales comme la GRI ou encore les objectifs développement durable de l’ONU (ODDs). Ils permettent d’évaluer la maturité de l’entreprise, sa capacité à piloter son organisation et à sensibiliser, mesurer et améliorer ses pratiques autour d’indicateurs clefs pertinents. Le label « Engagé RSE » utilise l’approche du PDCA, transposée sur une méthode de cotation (« scoring ») pour structurer et homogénéiser l’évaluation. Cette approche identifie les bonnes pratiques et les pistes d’amélioration possibles pour les entreprises. L’analyse porte sur la robustesse de la démarche RSE de l’entreprise. 

L’approche PDCA se déroule classiquement en 4 étapes : 

– Plan (Planification) : est-ce qu’une démarche/un indicateur existe ? 

– Do (Déploiement) : comment est déployé(e) cette démarche/cet indicateur ? 

– Check (Contrôle) : comment sont suivies l’avancée et l’efficacité de la démarche ? les résultats de l’indicateur sont-ils analysés et expliqués ? 

– Act (Amélioration) : l’entreprise cherche-t-elle à améliorer sa démarche/ses résultats et à se comparer à d’autres acteurs ? 

Concrètement, cette approche PDCA se décline en une liste de questions sur les pratiques stratégiques, managériales et opérationnelles et sur les résultats environnementaux, sociaux et économiques de l’entreprise. Ce questionnaire, soumis à évaluation, permet d’établir une notation sur chaque bloc de l’analyse PDCA. A l’issue de l’évaluation, un rapport explicatif est remis à l’entreprise avec une note sur 1000 points afin qu’elle détermine le niveau de maturité de sa démarche RSE et qu’elle s’améliore grâce à des suggestions concrètes.

Être « Engagé RSE » est une démarche qui s’inscrit dans le temps et entraîne les entreprises dans une recherche d’amélioration continue et de renforcement de la performance extra-financière. Vous avez suivi plus de 1000 entreprises labellisées « engagé RSE » dans le déploiement de leurs démarches RSE : quels principaux enseignements en avez-vous tirés ? Le premier et principal constat de ce suivi a été le suivant : le facteur clef de succès d’une telle démarche est l’implication. A tous les niveaux de l’entreprise : leadership du dirigeant, engagement des managers, motivation des collaborateurs. En complément, l’approche RSE doit s’inscrire dans la stratégie d’entreprises, intégrer l’ensemble des parties prenantes et enfin s’accompagner d’une rigueur des méthodes employées. 

Cette étude nous a aussi appris que : 

– La culture des systèmes de management est essentielle : 90 % des entreprises de l’échantillon ont pris appui sur l’existant pour déployer leur approche. 

– Il n’existe pas de mode d’emploi évident et commun pour tous : Les méthodes employées pour lancer et structurer les démarches RSE sont diverses. Ce résultat s’explique par la structure de la norme ISO 26000, qui donne un cadre de réflexion avec des lignes directrices, mais ne propose pas de mode opératoire précis pour mettre en place une démarche RSE. 

– Le manque de temps peut constituer une des principales difficultés au déploiement. 

L’étude s’est concentrée dans un second temps sur les entreprises les plus matures dans leur démarche RSE (entreprises dites « exemplaires ») et les a comparées avec les entreprises aux pratiques « dans la moyenne ». Et le constat est clair : ces entreprises matures déploient une performance économique significativement meilleure. Performantes dans leur démarche RSE, elles sont performantes au niveau global, financièrement et économiquement.

kShuttle : Vous avez suivi plus de 1000 entreprises labellisées « engagé RSE » dans le déploiement de leurs démarches RSE : quels principaux enseignements en avez-vous tirés ?

A.J. : Le premier et principal constat de ce suivi a été le suivant : le facteur clef de succès d’une telle démarche est l’implication. A tous les niveaux de l’entreprise : leadership du dirigeant, engagement des managers, motivation des collaborateurs. En complément, l’approche RSE doit s’inscrire dans la stratégie d’entreprises, intégrer l’ensemble des parties prenantes et enfin s’accompagner d’une rigueur des méthodes employées.

kShuttle : Hors Label « Engagé RSE », retrouve-t-on les mêmes résultats chez d’autres entreprises ayant mis en place une démarche RSE ?

A.J. : Une seconde étude a été menée par l’Afnor en partenariat avec l’institut de sondage BVA, pour confronter les résultats obtenus sur les entreprises labellisées « Engagé RSE » et d’autres entreprises françaises ayant déployé une démarche RSE. Plus de 400 interviews ont été menés avec des experts métiers issus d’entreprises aux démarches RSE plus ou moins matures : tous sont arrivés à des conclusions similaires. 

Cette enquête s’est aussi intéressée au lien entre démarche RSE poussée et surperformance de l’entreprise, et à l’importance de valoriser cette démarche RSE pour renforcer les bénéfices associés. 90% des entreprises interviewées confirme l’intérêt de cette valorisation qui permet de clarifier la vision et les actions menées vis-à-vis des parties prenantes, de leur donner du sens, et de mobiliser les salariés de manière plus approfondie. Une démarche RSE performante est un gage de performance financière et extra-financière, d’autant plus qu’elle est largement partagée et valorisée.

kShuttle : Pour conclure, et inciter les entreprises à s’engager, quels sont pour vous les principaux bénéfices d’une démarche RSE et d’une labellisation « Engagé RSE » ?

A.J. : Les bénéfices de la mise en place d’une stratégie RSE sont nombreux, comme en témoignent les organisations interviewées. En premières places des avantages énumérés, le renforcement de l’engagement des collaborateurs, le développement de l’attractivité de l’organisation, l’innovation et la différenciation vis-à-vis de la concurrence. Et ces bénéfices sont d’autant plus ressentis que la démarche RSE est mature. 

La labellisation « RSE engagé », dont les attentes répondent à 97% des labellisés, complète cette première approche : elle renforce la crédibilité de la démarche RSE de l’entreprise, crée une nouvelle dynamique positive interne, et propose des pistes d’amélioration pour progresser durablement. 

Il est important de souligner que ce n’est pas le label en tant que tel qui apporte de la performance extra-financière à l’entreprise, mais la méthodologie et la robustesse de la méthode d’évaluation. Les entreprises vont atteindre le niveau de maturité « exemplaire » parce qu’elles vont suivre les recommandations et pistes d’amélioration. Elles vont pouvoir progresser durablement et améliorer à la fois leur performance extra-financière et leur performance globale.

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