La réforme fiscale mondiale menée par l’OCDE et son fameux Pilier 2 bouleverse les pratiques des groupes internationaux. Cette réforme portée par l’OCDE vise à garantir une imposition minimale de 15 % pour les grandes entreprises multinationales.
À l’occasion de la première édition de kShuttle Connect, trois expert.es | Marie-Laure Navelot (kShuttle), François Lebelt (OP Mobility) et Laurent Leclercq (Fidal) | ont confronté leurs points de vue sur ce nouveau cadre réglementaire, un chantier de transformation structurelle. Décryptage d’un sujet complexe, mais stratégique.
1. De la fiscalité à la durabilité : une logique de bien commun
Dès l’introduction, Marie-Laure Navelot a posé les bases du lien entre fiscalité et durabilité : « La fiscalité sert à financer le bien commun : infrastructures, éducation, système social. […] C’est dans cette perspective que la réglementation Pilier 2 a été élaborée par l’OCDE. »
Elle rappelle l’objectif initial : rééquilibrer les contributions fiscales des grandes entreprises dans un contexte mondialisé. Un impératif, notamment pour les pays en voie de développement, trop souvent lésés dans la répartition des recettes fiscales.
2. Pilier 2 : de l’inertie à la structuration nécessaires des données fiscales
Si le calendrier impose une mise en conformité d’ici 2026, les enjeux dépassent largement la simple production de reporting. Le Pilier 2 impose une standardisation rigoureuse des données fiscales, souvent dispersées dans les systèmes d’information.
Or pour Marie-Laure Navelot, le constat est sans appel : « Il y a un certain attentisme. On a l’impression que certains groupes n’ont pas forcément identifié qu’il y avait un projet à mettre en œuvre. Et pourtant, le 30 juin 2026 arrive vite. »
Une posture attentiste d’autant plus risquée qu’elle pourrait entraîner une perte de contrôle sur la qualité des données fiscales à produire, et donc un risque financier, juridique et réputationnel important.
Un défi ? Oui. Mais aussi une opportunité de rationalisation.
Comme l’a souligné Laurent Leclercq, ce nouveau cadre crée une occasion rare de poser les bases d’une fiscalité plus lisible, plus interopérable, et mieux alignée avec les réalités opérationnelles.
3. Plus q’un sujet fiscal : une question de gouvernance
« Ce n’est pas qu’un sujet fiscal. C’est un sujet de données, de gouvernance, de qualité de l’information. » rappelait François Lebelt : le Pilier 2 implique la mobilisation de multiples fonctions, de la DAF à la DSI en passant par la comptabilité et les RH.
C’est bien là l’un de ses apports majeurs : forcer une coopération transversale entre équipes qui, historiquement, travaillent en silos. En ce sens, la mise en œuvre devient un catalyseur pour revoir la gouvernance, les circuits d’information, et même les outils.
4. Anticiper, structurer, coopérer
Certes, l’échéance réglementaire approche. Mais l’enjeu n’est pas uniquement d’être conforme. Il s’agit aussi d’anticiper les impacts sur la stratégie fiscale, les choix de localisation, et la maîtrise des données.
Marie-Laure Navelot, qui accompagnait plusieurs groupes sur ce sujet, insiste sur un point : les entreprises qui s’y prennent tôt capitaliseront mieux sur l’effort initial, en posant les fondations d’un système durable.
5. Un sujet encore trop discret au sein des entreprises… pour l’instant
La discussion a également mis en lumière un paradoxe : malgré son importance, le Pilier 2 reste peu discuté publiquement. Or, sa portée est considérable.
En exposant les enjeux, les bonnes pratiques déjà identifiées et les chantiers à lancer, les intervenants de cet atelier ont envoyé un message clair : le moment d’agir, c’est maintenant.
« Si on attend, on aura les mauvaises données, on fera les mauvais calculs, et les corrections coûteront encore plus », conclut François Lebelt.
Et plutôt que de subir la complexité, les entreprises ont tout intérêt à s’en saisir comme d’un levier d’alignement, de structuration… et de compétitivité.
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► Ne ratez pas la websérie « Les 10 min de Pilier 2 » présentée par Marie-Laure
